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Le PAEJ : un dispositif d’intervention sur le lien social au point où il menace de se rompre

Vulnérabilités et prévention

Par Marc Leray, président de l’Association nationale Point Accueil-Ecoute Jeunes (ANPAEJ)

LES CARACTÉRISTIQUES DU DISPOSITIF POINTS ACCUEIL ET ÉCOUTE JEUNES (PAEJ)
Crée en 1997 par l’Etat, le dispositif PAEJ a été transféré à la CNAF en janvier 2020. A l’issue d’une période transitoire de deux ans, les points d’accueil et d’écoute jeunes seront labelisés à partir d’un « référentiel d’agrément » commun CNAF et pilotés à l’échelle départementale par les CAF à compter du 1 er janvier 2023.

Depuis son origine, le PAEJ se propose comme interlocuteur de la jeunesse. Il est chargé de solidarité et de cohésion sociale auprès des jeunes et de leur famille, notamment en situation de vulnérabilité. Plus largement, il s’adresse aux professionnels de leur entourage quotidien. L’équipe pluridisciplinaire se compose de travailleurs sociaux, de psychologues cliniciens, d’animateurs, etc. A partir d’une action éducative et sociale, il s’agit autant de prévenir les ruptures que de soutenir la réinscription sociale quand les décrochages ont eu lieu.

Adaptabilité, mobilité et proximité sont les maitres mots de son action. Son cœur de métier consiste à susciter et favoriser le contact avec les jeunes et leur entourage par des interventions tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, individuelles ou collectives. Les modalités d’accueil et d’intervention sont multiples. Elles s’adaptent aux besoins de chaque jeune en le recevant ou en « allant vers » lui, mais également en étant présents sur les supports numériques. La priorité est de rendre « l’offre PAEJ » accessible en levant ou réduisant les freins pour rendre la rencontre possible. Pour ce faire, les 250 PAEJ déploient des antennes territorialisées, notamment dans les zones blanches, et des permanences d’écoute dans les locaux de partenaires d’action (Education nationale, centre sociaux, foyers jeunes travailleurs, associations).

C’est au total 1 000 points de contact opérationnels qui concrétisent la proximité avec le public et l’adaptation aux particularités des territoires (urbain, rural périurbain, etc.). Ils sont recensés sur le site cartosantejeunes.org pour connaître les PAEJ présents près de chez soi.

LES SPÉCIFICITÉS DE LA PRATIQUE PAEJ
Le PAEJ est un interlocuteur des questions que se pose le jeune mais c’est le jeune qui, au fil des rencontres, décidera de lui accorder sa confiance. La crédibilité du dispositif repose sur la condition de cette confiance. Les mauvaises expériences relationnelles, institutionnelles ou encore l’impact des « fausses informations » génèrent la méfiance, l’hostilité voire la défiance envers les institutions sociales et leurs représentants. La confiance est avant tout à restaurer. Une fois regagnée, elle sera le moteur de la relance du cheminement du jeune. Médiatiser d’abord pour renouer avec lui-même, avant de se réinscrire parmi les autres.

La rencontre est rendue possible grâce à l’accueil inconditionnel pro- posé par le PAEJ. C’est autour de cet enjeu central que se construit son offre. Il suppose une souplesse de la structure porteuse et des dispositions personnelles et professionnelles pour les intervenants. Elles se traduisent par des conditions d’intervention non standardisées et des pratiques ouvertes à l’initiative dans le sens du respect de la capacité d’agir des jeunes. Afin d’y parvenir, l’accueil s’adapte à leurs modalités d’expression autant qu’aux caractéristiques de leur contexte familial et social. Une écoute est apportée. Les professionnels se gardent de tout jugement afin de soutenir leur expression, quelle que soit sa forme : apaisée ou virulente, utilisant la parole ou d’autres médiations (dessin, musique, cuisine).

L’accompagnement, quant à lui, vise à appuyer chaque jeune dans le cheminement de son expression et dans son inscription sociale. C’est l’élaboration de l’expression qui oriente, et non l’idée ou le souhait du professionnel. Il vient en appui d’un parcours dont il ne connait pas d’emblée la destination, mais qui, par son cheminement, va construire une orientation de vie pour le jeune. C’est parce que le PAEJ est « décalé » des logiques institutionnelles
qu’il peut entrer en résonnance avec le décalage vécu ou subi du jeune face aux institutions qui le stigmatisent ou le rejettent. C’est à cette place qu’il peut accueillir et écouter les questionnements du jeune qui cherche sa place, qui peine à la trouver ou qui n’arrive pas à l’inscrire dans des liens sociaux.

L’enjeu existentiel des questions cruciales de l’adolescence consiste bien à construire et choisir sa singularité avec les limites familiales et sociales qui pèsent sur chacun quant à l’acceptation de la différence radicale. Le dispositif sert d’appui à ce cheminement par lequel le jeune va réussir à inscrire positivement sa différence parmi les autres. Médiation plus ou moins longue entre le jeune, le PAEJ et le social élargi qui vise son autonomie et l’exercice de sa citoyenneté.

L’intervention du PAEJ est indissociable d’un partenariat d’action. L’insertion dans le partenariat est sa condition d’exercice autant que celle de la réussite du parcours du jeune. Ce travail interstitiel suppose une bonne connaissance du contexte territorial, de l’environnement social et des différents acteurs qui y interviennent. En effet, cette bonne insertion parmi les acteurs locaux est indispensable pour que l’accompagnement du jeune aboutisse positivement, c’est-à-dire, qu’il puisse « re- prendre place » dans des liens sociaux qui passe obligatoirement par différentes institutions : école, formation, logement, santé, etc.

Plus d’informations sur www.anpaej.fr