Le recours à l’intérim en protection de l’enfance, longtemps perçu comme un dispositif d’appoint au service de la continuité des prises en charge, connaît aujourd’hui une croissance sans précédent. Ce phénomène traduit moins une évolution conjoncturelle qu’une crise structurelle profonde – d’attractivité des métiers du secteur et du pilotage public des politiques de protection de l’enfance.
Les associations adhérentes à la CNAPE dressent un constat clair : l’intérim, lorsqu’il devient un mode de gestion ordinaire, porte atteinte à la stabilité des parcours, à la cohérence éducative et à la santé des enfants et des jeunes accompagnés. Il introduit une discontinuité contraire à l’exigence de sécurité affective qui fonde toute mission de protection.
Au-delà de ses effets délétères pour les enfants, le recours massif à l’intérim fragilise le tissu associatif, désorganise les collectifs de travail et alimente un cercle vicieux d’urgence, de surcoûts et de dépendance. Il ouvre aussi la porte à des acteurs privés lucratifs dont la logique marchande est incompatible avec le principe d’intérêt supérieur de l’enfant et la vocation non lucrative de la protection des enfants.
Face à cette situation, la CNAPE appelle à une inflexion politique majeure pour :
- Réaffirmer la mission d’intérêt général de la protection de l’enfance et la nécessité de préserver son ancrage associatif et non lucratif ;
- Encadrer drastiquement le recours à l’intérim, en étendant les plafonnements de coûts, en renforçant les contrôles de qualité et en responsabilisant les départements ;
- Refonder l’attractivité des métiers, par une convention collective unique étendue, une politique salariale ambitieuse et des conditions d’exercice à la hauteur des exigences éducatives.
Les enjeux sont majeurs : ne pas laisser s’installer un modèle de gestion fondé sur la précarité et la discontinuité, mais redonner à la protection de l’enfance les fondements structurels et humains de sa mission.